Menues annonces, petits comptes d’épicier qui tiennent facilement sur un simple post-it, insultants et dérisoires.
C’est hélas désormais la norme dans les stratégies de communication gouvernementale, à chaque geste concédé, à chaque renfort annoncé à tel ou tel service public, les chiffres sont gonflés de moyens qu’il était en réalité déjà prévu d’allouer ou de sommes d’argent déjà budgétées. Urgence ou non, crise sanitaire ou pas, on ne peut quand même pas s’attendre à ce qu’en haut lieu on déroge à la rigueur idéologique. Le chiffre de 3300 contractuels ainsi fabriqué est à mettre en perspective avec les 2300 contrats non renouvelés en septembre dernier dans la seule académie de Créteil, ou les 500 autres ayant connu le même sort dans l’académie de Versailles. Avec cette petite rallonge apparente, le ministère ne compense donc même pas la perte d’agents qu’il a lui-même organisée au beau milieu de la crise sur l’ensemble des académies et malgré nos cris d’alerte à la rentrée. Formidable mansuétude !
Le SNCL prend toutefois acte des renforts administratifs et de surveillance accordés, mais en termes d’enseignement, l’annonce d’hier se limite donc au recrutement des candidats aux concours sur liste complémentaire, soit selon les mots même du ministre « quelques centaines de personnes ».
Ce sont donc quelques centaines de personne qui vont devoir sauver l’école de France ! Plus que jamais il parait illusoire d’espérer voir cette administration connaitre enfin un sursaut de conscience et s’engager véritablement dans la lutte contre la catastrophe de la covid-19 en milieu scolaire. L’essentiel des arbitrages rendus consiste en vérité, encore et toujours, à minimiser cette catastrophe. C’est pour cela que ce ministre qui ne doute jamais de rien a osé sur la première semaine de janvier déclarer le nombre de contaminés à « quelques 50 000 élèves », quand les statistiques publiques, vérifiables et certaines, faisaient, elles, état de 398 137 enfants atteints.
Ce ministère ne combat pas une épidémie, il soigne une opinion publique et cherche à remporter la bataille des chiffres, préférant stigmatiser une part de la population pour satisfaire l’autre, notamment en imposant l’éviction de sept jours des collégiens et lycéens cas contact non vaccinés.
Concernant le déploiement des capteurs de CO2, le ministre s’est contenté de renvoyer la responsabilité vers les collectivités locales, répétant ce qu’il a déjà avancé à plusieurs reprises comme justification de la lenteur de ce déploiement dans les écoles : le fond existe, ce sont les départements et les régions qui ne le sollicitent pas. Ce qu’il faut comprendre, c’est donc que même après des mois d’appels à l’aide, après la forte mobilisation des personnels hier et avec l’explosion des contaminations en milieu scolaire que nous connaissons actuellement, il n’y aura pas de politique volontariste et contraignante de l’Etat en la matière. Mais il est probablement utopique de l’attendre d’un Etat qui n’a même pas su ou voulu organiser une chaine d’approvisionnement continu en masque FFP2 pour ses agents les plus exposés à la promiscuité avec les publics non masqués, et daigne seulement aujourd’hui en promettre 5 millions après des mois d’attente et des semaines de contamination galopante.
Le report des épreuves du baccalauréat de mars, qui s’impose d’évidence un peu plus chaque jour à tout enseignant aujourd’hui confronté à des classes clairsemées et des taux d’absence d’élèves qui atteindront bientôt les 18%, ne sera pour l’heure qu’envisagé, et ultérieurement. Là encore, l’image prime sur le réel, JM Blanquer étant moins soucieux de la réussite des élèves que de ne pas désavouer sa réforme du bac si médiatisée.
Le ministre a enfin déploré « le manque de dialogue », déclaration pour le moins surprenante de la part d’un homme qui, au contraire, il y a quatre jours seulement, avait déclaré : « le dialogue social est total » et pour qui la stratégie qui consiste à faire passer le noir pour du blanc en déclarant à chaque fois l’exact contraire de la vérité était devenue un mécanisme de défense aussi systématique que ridiculement flagrant.
Alors aujourd’hui, changement de style ?
On promet rue de Grenelle des rencontres bimensuelles avec les organisations : heureuse initiative au bout de plus de deux ans de crise et à trois mois de la fin de la mandature !
La cause de notre ministre est si perdue en matière de dialogue social que même une main frêle soudainement tendue de sa part fait pressentir davantage une gifle ou un piège que l’offre d’une aide sincère.
Le SNCL espère que l’intersyndicale nationale signataire de l’appel du 13 ne s’abaissera pas au satisfécit après ce dernier numéro d’un illusionniste passablement fatigué.
Le SNCL appelle tous les personnels à résister malgré tout au découragement, à dénoncer et faire connaitre au plus grand nombre les dysfonctionnements, les mises en danger, les pressions et les intimidations qu’eux-mêmes et leurs élèves subissent, et à user de leur droit de retrait chaque fois que nécessaire. Il les encourage à poursuivre la mobilisation, seul moyen de contraindre le ministère à faire tomber le masque et se montrer enfin à la hauteur des enjeux.