Depuis le 17 juillet dernier, des dizaines de collectifs et une intersyndicale professionnelle se sont organisés en Guadeloupe pour porter la parole de personnels des services publics, de la jeunesse, et plus largement de toute une population insulaire épuisée, en colère, et exprimant le refus du pass sanitaire et de l'obligation vaccinale. Afin d'être entendus par les autorités, ces organisations ont manifesté sans relâche, chaque samedi, pacifiquement, ceci donc maintenant depuis plus de quatre mois. La section du SNCL de Guadeloupe a été partie prenante de ces manifestations afin de faire entendre la souffrance et le désarroi des personnels de l'Education nationale.
Aucun pouvoir public n'a répondu à ces appels. Nos collègues ont été ignorés avec un mépris insupportable, alors que chacun d'entre eux constituait un avertissement qu'il aurait été raisonnable d'entendre.
La situation en Guadeloupe est d'une gravité qu'on peine à reconnaitre en métropole. Elle n'est pas la conséquence du seul contexte sanitaire, qui n'est qu'un facteur aggravant ayant mis en lumière d'autres problématiques bien plus profondes et anciennes. Elle est le résultat de décennies de méjugement et de renoncement de la part des gouvernements nationaux successifs comme de celle des responsables politiques locaux.
Comment appliquer des mesures sanitaires prescrites de loin, à Paris, dans des écoles et des collèges de Guadeloupe parfois contraints de fermer, faute d'alimentation en eau ?
Comment accepter les 1 600 mises à pied prononcées contre les personnels soignants de l'île aujourd'hui, ces mêmes qui, au plus fort de la crise covid, quand il n'était pas encore question de vaccin, ont sauvé des vies au prix des leurs et porté à bout de bras le système de soin guadeloupéen, sans aide et sans moyens ?
Comment admettre les suspensions de salaire dont on menace aujourd'hui les assistantes sociales et les psychologues de l'Education nationale qui n'acceptent pas de se voir imposer les obligations vaccinales découlant de textes qui ont été pensés d'abord pour les soignants pédiatriques dont le travail implique une promiscuité évidemment très différente avec les enfants ?
Comment comprendre que l'Etat français, qui avait mis six semaines à envoyer des respirateurs et de l'oxygène sur place lors de la première vague de la covid-19, met deux jours pour y déployer le RAID et le GIGN ?
Aussi, le ras-le-bol et la colère engendrés par la déconsidération ressentie par les Guadeloupéens sont, en métropole, trop hâtivement assimilés à une seule posture anti-vaccinale.
Le SNCL condamne fermement tous les débordements de violence mais tient à faire savoir que l'abandon de tout dialogue social de l'actuel gouvernement lui fait aujourd'hui porter une responsabilité indéniable dans ces dérives qui auraient pu être largement évitées si, depuis quatre mois, avaient été à chaque fois préférés le dialogue à l'ignorance, la négociation au blocage, et la pédagogie de terrain à la froideur autoritaire de l'administration.