LE CONSTAT EST SANS APPEL :
Les études se succèdent et leurs résultats convergent depuis 12 ans : le pouvoir d'achat des professeurs français a reculé d'un tiers depuis les années 80. La hausse continue des prélèvements, l'inflation, l'allongement des carrières et des durées d'échelon et le gel du point d'indice cumulés ont provoqué ce véritable déclassement social. Le passage aux 39h hebdomadaire pour la société civile avec une cinquième semaine de congés payés en 1982, resté sans conséquence pour les enseignants, puis le passage aux 35h (là aussi sans que l'organisation des services enseignants n'aient été revus depuis 1950), ont également contribué au décrochage. Le résultat est connu de tous : les salaires moyens des professeurs français sont en-dessous de la moyenne des salaires constatés dans l'OCDE, et un jeune enseignant démarre désormais à 1,2 SMIC (là où il en touchait 2 en 1983). Même s'il n'explique pas tout, le montant du salaire joue inévitablement sur l'attractivité du métier, un métier dont la pénibilité s'est accrue au contraire dans la même période, alors qu'à l'inverse le niveau d'étude exigé à l'entrée a pour sa part augmenté. Bref, un grand écart désormais intenable et qui se traduit, à cette rentrée, par 8000 professeurs des écoles et 40 000 professeurs du second degré manquant à l'appel...
LES PROMESSES ÉLECTORALES :
E. Macron s'était engagé (jusqu'à l'avant-veille du deuxième tour) à une revalorisation salariale en trois temps pour les professeurs, chacun étant présenté comme indépendant des autres :
- Le dégel du point d'indice.
- Une revalorisation inconditionnelle de 10%
- Une augmentation de salaire de 20% liée à l'acceptation de missions complémentaires.
Le dégel du point d'indice est devenu effectif en juillet dernier, avec une hausse de +3,5%. Bien qu'honorable, cette hausse et d'ores et déjà inférieure à l'inflation constatée en France (6,1% au 1er août dernier). Il ne doit donc pas s'agir d'une mesure isolée, mais du début d'une reprise des révisions régulières, sans quoi les augmentations concédées par ailleurs seront en trompe-l'oeil, grignotées par l'inflation non compensée.
La revalorisation inconditionnelle de 10% : elle a été à nouveau présentée en ces termes fin août par E. Macron, lors de son discours aux recteurs. Volant la vedette à son ministre de l'Éducation nationale à quelques jours seulement de la rentrée scolaire, le Président a confirmé son niveau, en précisant que l'effort serait un peu plus porté sur les salaires de début de carrière, notamment en amenant la rémunération des nouveaux entrants dans le métier à 2000 euros nets. Cette déclaration pose néanmoins plusieurs problèmes : pour être comptée comme une revalorisation inconditionnelle, cette augmentation ne doit porter ni sur les heures supplémentaires (que les stagiaires n'ont d'ailleurs pas vocation à faire), ni sur les primes. Il n'est à ce jour pas précisé si ce montant concerne les stagiaires ou les titulaires 1ère année. De plus, il serait absurde de procéder à cette augmentation, sans revaloriser immédiatement au même niveau le salaire de tous les enseignants plus anciens qui ne sont pas déjà à ce niveau, c'est-à-dire tous les professeurs des écoles et professeurs certifiés en-dessous de l'échelon 8 de la classe normale. On voit bien qu'une telle mesure entrainera en cascade une révision de l'ensemble des grilles indiciaires avec un probable tassement aux charnières de la hors classe et de la classe exceptionnelle. Même si le montant de 10% est conséquent, le SNCL rappelle aussi qu'il ne couvrira qu'un tiers environ du salaire perdu par notre profession en quarante ans.
20% d'augmentation et un " nouveau pacte " : reste enfin le troisième volet, qui n'est pas une revalorisation à proprement parler, mais une augmentation du salaire mécaniquement obtenue par une augmentation des tâches accomplies par les agents. Travailler plus pour gagner plus. D'abord affiché à hauteur de 20% du salaire actuel par E. Macron, ce point est finalement apparu moins clair dans les déclarations de fin août, et laisse penser qu'il s'agirait plutôt de 10% supplémentaires s'ajoutant aux premiers 10% inconditionnels. En mars dernier, ces missions nouvelles avaient été présentées comme facultatives, et liées à un possible nouveau type de concours de recrutement (donc un nouveau statut) : les nouveaux enseignants qui seraient recrutés par ce nouveau concours obtiendraient par ce statut à la fois de nouveaux devoirs et une grille de salaire plus avantageuse. Les anciens enseignants pourraient être à leur demande reclassés dans le nouveau statut.
Passés quelques mois, cette hypothèse s'est éloignée des discussions ministérielles pour faire place à un autre scénario : un fonds d'innovation (au montant faramineux) piloté par le rectorat, avec de l'argent venant récompenser les enseignants engagés dans des missions innovantes inscrites au projet de leur établissement. Ces "super IMP" entérinaient le salaire à la carte en augmentant le pouvoir du chef d'établissement, en mesure de faire la pluie et le beau temps en matière de rémunération des professeurs...
Finalement, c'est un rétropédalage qui est apparu dans les déclarations d'E. Macron la semaine dernière : le fonds d'innovation sera toujours là, mais doté "seulement" de 500 millions d'euros. En revanche, l'idée d'un "nouveau pacte" refait surface mais on ne parle plus exactement de nouveau concours : l'enjeu politique principal actuel étant le remplacement des professeurs, il y a fort à parier que l'engagement des collègues à remplacer les autres professeurs absents au pied levé fera partie des conditions. Quoi qu'il en soit, le SNCL insiste : nous ne parlons pas là de revalorisation, mais simplement du complément de salaire normal qui est dû à toute personne qui travaille davantage.
Pour le SNCL, le compte n'y est pas : pour cette raison, nous serons reçus au ministère de l'Education nationale le 1er septembre prochain afin d'éclaircir les modalités et proposer notre propre point de vue. Nous vous tiendrons informés aussi vite que possible.
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